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Deux arbres






Après avoir fait les offrandes du matin et bu un bon thé chaud, Oriandre me proposa de faire quelques pas dans la forêt.

Le soleil était déjà bien haut dans le ciel. La matinée était radieuse.


Nous avons emprunté le chemin sacré. Je l’appelle ainsi car nous marchons lentement et nous faisons des prières à chaque pas, à chaque rivière que nous croisons, et à quelques arbres ou grandes roches sur le chemin. Ce chemin mène à un lieu de retraite et de prière dans la montagne.


Assez rapidement, alors que j’étais concentré sur mes pas et les prières silencieuses, Oriandre bifurqua et emprunta une sente que je n’avais jamais remarqué auparavant. Je le suivis. Vraisemblablement, il avait quelque chose à me partager, car il m’attendit un peu plus haut. Dans la pente, je le rejoignis et me tins à son niveau. Il me regardait d’un air radieux et commença ainsi : « A toi, je peux le dire. Tu marches dans le pas des druides. » Il sourit et fit un geste large avec son bras « tu vois, il y a deux types d’arbres ».


J’attendais la suite patiemment, en restant silencieux. Lui, il regardait les arbres qui nous entouraient. Il y avait là des résineux, principalement des sapins de montagne, ainsi que quelques hêtres, frênes et noisetiers. J’attendais le cours sur les arbres, mais Oriandre restait silencieux.


Je regardais autour de moi, afin d’essayer de sentir ce qui l’avait inspiré sur l’instant. Effectivement, il y avait des arbres autour de nous, le son des rivières du chemin de prière, et de grandes montagnes complétaient le paysage en arrière plan.


Puis il reprit sa marche sur la petite sente et je le suivis sans avoir compris la moindre chose de cet enseignement. Après une petite heure de marche, nous arrivâmes à une source d’où jaillissait un petit filet d’eau. Après avoir bu, Oriandre resta assis. Nous étions sortis de la forêt, assis dans une pente herbeuse et le paysage s’était ouvert.


« Il y a deux types d’arbres. Ceux de la forêt où nous étions et les autres ». Je tendis l’oreille afin d’écouter cette nouvelle leçon.

« Une fois nous étions dans la forêt, et maintenant elle est un peu plus loin, à l’extérieur. Cela pour nous montrer qu’il y a deux façons de rencontrer les arbres. De l’extérieur ou de l’intérieur. Nous avons l’habitude de les rencontrer de façon extérieure, avec le regard, parfois avec le toucher. Les rencontrer de l’intérieur, dans la façon des druides, c’est de les sentir de l’intérieur. Que ce soit un arbre familier avec lequel tu vas méditer ou prier, auquel tu vas parler, faire des offrandes, ou un arbre que tu rencontres pour la première fois, il y a une façon de rencontrer l’arbre de l’intérieur. D’en faire l’expérience intime.

Je t’ai déjà appris à m’écouter par les paroles et par le geste, mais tu as aussi appris à écouter par imprégnation. Avec les arbres, c’est pareil. Tu ouvres ton espace « entre ». Tu t’ouvres à cette perméabilité à la présence invisible. Et tu bascules dans le deuxième ou le troisième monde. Tu rentres en vibration. Tu entres dans la symphonie vibratoire que tes sens subtils perçoivent.

Tu peux faire cela aussi avec la montagne, le ciel profond, le soleil lointain ou la petite source ici.

Tu n’es pas seul, il y a des centaines de milliers d’herbes qui sont avec toi.

Laisse tes pensées, tes histoires et tes ressentis habituels continuer leur chemin sans toi. Tu peux choisir à chaque instant de vibrer avec ce qui est.

Eveille l’arbre en toi.

Druide signifie aussi « laisser vibrer ». Les arbres sont des portes vers les mondes autres. Vers les perceptions autres. Quand tu rencontres un arbre, tu changes de monde. Tu changes la réalité. Tu sors du temps, de l’espace limité, et tu t’ouvres aux terres d’Avallon. Invite les terres magiques dans ce monde. Il en a besoin. C’est le temps des druides et le temps des miracles. Nous basculons sur Terre dans une nouvelle ère.

Comme cette source, les anciennes connaissances jaillissent et s’offrent à celles et ceux qui viennent s’y abreuver.

Comme ces arbres, les trésors cachés se révèlent à qui vient les rencontrer et les activer.

C’est le temps des druides, le temps de renouer avec ce que nous sommes vraiment.


Ecoute les arbres.

Ecoute les intérieurement.

Ecoute l’espace silencieux où vous vous rencontrez.

Intérieurement.

Et dans le vide autour de toi.

Ecoute.

Ils ont beaucoup à t’apprendre.

Ils ont beaucoup à t’enseigner. »


Un majestueux rapace apparu dans le ciel, et son vol gracieux accueillit le silence qui suivit.


Stéphane


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